
En touchant chaque année plus de 35 000 travailleurs, les troubles musculosquelettiques (TMS) se classent en tête des problèmes de SST au Québec. La plupart des gens atteints retournent au travail en moins de deux semaines, mais 20 % de ceux qui souffrent d'un traumatisme vertébral ou de problèmes inflammatoires s'en absentent pendant plus de 90 jours.
Et plus de 11 % d'entre eux n'ont toujours pas repris leur poste après plus de 180 jours, période suivant laquelle certains restent incapables de le faire, la chronicité s'étant installée. Or, bien que des recherches récentes indiquent la présence de facteurs psychologiques dans l'incapacité à retourner au travail, les techniques de réadaptation classiques, quoique multidisciplinaires, en tiennent rarement compte. « L'accent est mis sur la blessure physique, commente Brent Beresford, étudiant au doctorat en psychologie industrielle à l'Université du Québec à Montréal (UQAM), et on pense que la personne devrait voir un psychologue seulement lorsqu'elle ne récupère pas comme on l'espérait, qu'elle ne retourne pas au travail à la vitesse prévue, et qu'elle manifeste des symptômes de dépression, d'anxiété ou de frustration. » Le défaut d'intervenir rapidement risque toutefois de prolonger la période de réadaptation et de rendre le retour au travail encore plus difficile, sinon impossible. Ce constat a amené le doctorant à entreprendre une recherche qui s'appuie sur la thérapie d'acception et d'engagement associée à la pleine conscience, un concept émergeant qui se répand de plus en plus dans nombre de sphères.
Pleine conscience, dites-vous ?
Difficile à définir, même sous son appellation anglaise d'origine, mindfulness, la pleine conscience est aussi appelée présence attentive en français. Il s'agit de décider délibérément de porter son attention sur ce qui se passe dans le moment présent, sans passer par le filtre de nos jugements. « On va nécessairement avoir le réflexe de juger, d'analyser, de catégoriser les choses, explique Brent Beresford, mais on peut reconnaître qu'on le fait et prendre du recul. C'est une façon d'être, parce qu'en choisissant d'être attentif et présent dans la majorité des moments de la vie, notre relation avec toutes nos expériences change. » Accoler la notion de pleine conscience aux thérapies de réadaptation traditionnelles pourrait ainsi venir en aide aux travailleurs blessés, qui vivent souvent une grande détresse : « Des modèles ont démontré qu'un trauma enclenche immédiatement une gamme de réactions psychologiques face à la douleur, comme le catastrophisme, la peur de bouger et des symptômes de dépression. »
Puisque les effets possibles de cette troisième vague de l'approche cognitivocomportementale dans le traitement des personnes atteintes de TMS comportant une douleur subaiguë n'ont pas été évalués en vue de prévenir la chronicité, le doctorant utilise cette nouvelle méthode pour mener une recherche à laquelle participent quelque 120 sujets, répartis en trois catégories. Tous reçoivent des traitements de physiothérapie usuels, alors que ceux de la deuxième catégorie participent aussi à une thérapie de groupe basée sur l'approche de la thérapie de l'acceptation et de l'engagement, et ceux de la troisième, à un programme de réduction du stress basé sur la pleine conscience, crée par Jon Kabat-Zinn et le Center for Mindfulness de l'Université du Massachusetts (MBSR). L'objectif de Brent Beresford est « de voir s'il est possible de changer la relation des travailleurs blessés avec la douleur, d'intervenir pour aider à briser le cercle vicieux des pensées négatives, la peur qui les empêche de bouger et le fait qu'ils deviennent un peu désespérés » face à leur réadaptation. Favoriser dès le départ la résolution des éléments psychiques qui peuvent entraver leur parcours pourrait alors transformer leur perception de leur cas et ainsi, faciliter leur retour à une vie active, pleine de sens.
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